• Conseillé par
    1 avril 2015

    Très bel album sur les États-Unis du début du siècle dernier confrontés au travail des enfants. Pour les familles très pauvres, ce travail était une nécessité, les parents ne pouvant pas se passer de cet apport de revenu aussi minime fut-il, car en plus de travailler dur, les enfants étaient mal payés. Tout cela, on le sait déjà ; on sait également que ça existe encore dans certains pays dans lesquels les Occidentaux font fabriquer leurs produits qu'ils importeront et vendront cher.

    Cette BD a le mérite de nous rappeler qu'il a fallu que certains se battent contre l'exploitation des enfants, contre la course au profit pour libérer les enfants : "La consultation des archives locales était assez édifiante... On y lisait que plusieurs législateurs progressistes s'étaient cassé les dents à vouloir obtenir ne serait-ce qu'un semblant de réforme sur le travail des enfants. La partie était perdue d'avance parce qu'ils avaient en face d'eux le tout-puissant lobby de patrons. Ceux-ci n'envisageaient pas de se priver si facilement d'une telle main-d'œuvre, par définition docile, qu'ils pouvaient exploiter sans vergogne." (p.22)

    Cet album s'il met en scène Owen, un personnage fictif, est basé sur la réalité d'un reportage photo mené par Lewis Hine. Owen Brady est son double professionnel mais sa vie d'enfant martyr et d'adulte violent -parfois de manière totalement contradictoire avec le reportage qu'il réalise, avec les gens qu'il rencontre- est fictive. Sans faire de la psychologie de comptoir, Marc Malès met bien en dessins la difficulté de faire face à son enfance lorsqu'une situation qu'on rencontre adulte nous la remet en pleine face. Reproduit-on la violence dont on a été victime ? Jusqu'où peut-on expliquer les pulsions violentes des adultes battus et exploités lorsqu'ils étaient enfants ? Peut-on tenter de réparer le mal fait ? En ce début du XX° siècle, les réponses psychiatriques, psychanalytiques, et autres psy n'étaient pas encore pratiques courantes.

    Format à l'italienne qui permet d'élargir certaines cases, de faire des panoramiques, jeu avec le nombre des cases par page, dessin réaliste et ton sépia font de cet album une belle réalisation, une bande dessinée sociale et historique.