Pike

Whitmer, Benjamin

Éditions Gallmeister

  • Conseillé par
    6 novembre 2012

    Glauque, très Glock !

    «Officiellement, Sarah est morte d’une overdose.
    Je cherche quelqu’un qui pourrait m’en convaincre.»

    Sarah, sa fille qu’il connaissait à peine...

    Pike, ancien truand, s’est rangé des voitures comme on dit dans le milieu.

    Il (sur)vit maintenant de petits boulots.
    Presque tranquille. Sans trop d’amis. Juste ce qu’il faut.
    Juste avec ses livres.
    «Il passe son temps à lire des livres bizarres. Ou à insulter ceux qui les ont pas lus."
    Y’a bien son pote Rory le jeune boxeur des rings minables qui rêve de gloire.

    Pike «hérite» de Wendy, sa petite fille, une gamine de douze ans qui n’a pas froid aux yeux et qui lit Edgar Allan Poe.
    Wendy, enfant écorchée vive et son inséparable chat Monster toujours fourré sous son sweat.

    Nous sommes à Cincinnati pendant les années Reagan.

    Les femmes des classes moyennes supérieures s’achètent des salons à crédit pour se prouver qu’elles appartiennent aux classes moyennes supérieures.
    «On s’achète une petite maison dans ce trou à rats et on se fait grossir à la bière jusqu’à ce que le coeur lâche définitivement.»

    Cincinnati. Une vieille ville. Fondée par d’anciens esclaves, des Blancs pauvres et des Indiens.
    Aujourd’hui habitée de bouseux rongés par l’alcool aux casquettes des Bengals ou des Reds.
    Ici, le soleil est gris et le monde a basculé.

    Pike sent bien que le déjanté Krieger, le policier tueur de «nègres», le vétéran du Vietnam, rôde un peu trop près de Wendy.

    «Une fois sobre, faut toujours faire ce qu’on a dit qu’on ferait quand on était bourré.» Hemingway...soi-disant.

    Waouh, comme ce roman est noir !
    Noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir !
    Du brut chez les brutes !
    Faut avoir le coeur bien accroché je vous préviens !
    L’écriture de Whitmer est froide comme une lame de rasoir et nous laisse un goût de sang dans la bouche.
    Tout droit dans les ruelles «coupe-gorge», les squats de drogués, les immeubles en ruine, les relais routiers bien crasseux, les bordels bien poisseux et j’en passe et des bien pires...on en sort désespéré !

    Trop c’est trop ? A vous de lire (dire) cher lecteur.
    C’est sinistre et pourtant ça se dévore en une bouchée.
    C’est le talent caché de ce jeune écrivain...à suivre de près.

    Benjamin Whitmer est né en 1972 et a grandi dans le sud de l’Ohio et au nord de l’État de New York. Il a publié des articles et des récits dans divers magazines et anthologies avant que ne soit publié son premier roman, Pike, en 2010. Il vit aujourd’hui avec sa femme et ses deux enfants dans le Colorado, où il passe la plus grande partie de son temps libre en quête d’histoires locales, à hanter les librairies, les bureaux de tabac et les stands de tir des mauvais quartiers de Denver.

    «Le noir semble être le dernier endroit où l’on peut écrire sérieusement sur les sujets importants. Classes, races, marginalité, liberté, prisons et punitions, violence, l’enfer de l’histoire, les bons sujets.» nous dit l’auteur.

    «Tenant sa cigarette dans sa petite griffe de main, elle l’éteint en se l’enfonçant dans l’avant-bras, juste pour avoir pensé à ça. sa peau frémit et brûle. Dehors, rien ne change. Dedans non plus.»

    Bon, ben mainteant je vais vite aller prendre l’air de la campagne et en rentrant je vais me faire une dose de poésie bien mièvre, genre Alfred de Musset tiens.

    OUF !


  • Conseillé par
    27 septembre 2012

    Douglas Pike a pas mal roulé sa bosse et n'a pas fait que le bien autour de lui. Ses méfaits font dorénavant partie du passé, il est revenu dans l'Ohio, à Nanticote, sa ville natale où il vit de petits boulots, toujours accompagné de Rory, un jeune paumé qui rêve de devenir boxeur professionnel. Leur train-train est sérieusement chamboulé le jour où débarque Wendy, la petite-fille de Pike, qui vient de perdre sa mère, Sarah, victime d'une overdose. Pike est la seule famille qui lui reste et il décide de la garder avec lui, même si a priori la gamine a l'air du genre teigneux et difficile. Tout aurait pu en rester là sans l'intervention de Derrick Krieger. Ce flic, violent et corrompu, s'intéresse de trop prêt à Wendy. C'en est assez pour Pike qui décide d'aller à Cincinnati, regarder de plus près comment Sarah est morte.

    Du noir, du très noir pour ce premier roman de Benjamin WHITMER dans lequel on plonge en apnée vers les profondeurs de la bassesse humaine. Les hommes sont rudes, durs au mal, cyniques, violents et n'hésitent pas à tuer celui qui viendrait faire obstacle à leurs plans. Les filles se droguent, se prostituent pour payer leurs doses. Les flics ont la gâchette facile, sont dealers ou proxénètes. A Cincinatti, dans les squats où cohabitent SDF, poivrots et drogués, une femme même morte peut servir à prendre du plaisir et un cadavre ne repose pas en paix tant que son odeur n'alerte pas les autorités. Dans les rues, les flics tirent à vue sur les dealers qui travaillent pour eux et qui auraient eu l'inconscience de grapiller une petite part du magot. Dans les bois, les vétérans du Vietnam revivent cent fois leur guerre dans des campements de fortune. Tout n'est que violence brute et animale.Celui qui croit avoir connu le pire sait que le pire est encore à venir, l'espoir n'existe pas...
    Grâce à une écriture sobre et efficace, des chapitres courts et incisifs, on dévore ce roman âpre et sombre mais on tourne la dernière page avec soulagement, c'est si bon de respirer à nouveau!
    Une très belle découverte que je recommande vivement au lecteur suffisamment armé pour supporter toute cette misère humaine.