Mon oncle d'Algérie
EAN13
9782234069602
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Langue
français

Mon oncle d'Algérie

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« Dans mon souvenir d’enfant, mon grand-oncle, Fernand Doukhan était un vieux
grincheux qui semblait se battre contre des moulins à vent. Dix ans après sa
mort, cette image est venue se heurter à une notice biographique de quelques
lignes, sur son passé d’anarchiste en Algérie, que j’ai découverte sur
Internet. C’est ainsi qu’est née l’idée de ce livre.
Il venait d’une famille juive berbère, comme la moitié des juifs d’Algérie,
sans doute installée là depuis le xie siècle. Il voit le jour à Alger, en
1913. Il est le premier homme de la famille à naître français, le premier à
avoir un prénom qui ne soit pas hébraïque, le premier à apprendre le français
à l’école, le premier à devenir instituteur, alors que de génération en
génération, chez les Doukhan, on était matelassier, brocanteur, domestique… Il
va partir au front dès le début de la Seconde Guerre mondiale pour défendre le
drapeau français. Il est fait prisonnier, le 23 octobre 1940, envoyé pour cinq
ans dans les stalags allemands, alors qu’à Alger le régime de Vichy supprime
le décret Crémieux, retire leur nationalité aux juifs, leur interdit
d’enseigner. À son retour, instituteur à l’École Lazerges, dans le quartier de
Bab el Oued, il devient anarchiste, commence à s’emporter contre cette France
coloniale qui laisse derrière les grilles de ses écoles la majorité des
enfants musulmans. Quand éclatent les premières attaques du FLN, en novembre
1954, les anarchistes et les trotskistes sont les seules mouvances politiques
à réclamer la fin de la colonisation française. Fernand Doukhan milite de plus
en plus activement. Il s’insurge, dans le journal Le Libertaire, contre « la
dictature française en Algérie»… Il est arrêté le 28 janvier 1957, en pleine
bataille d’Alger. Parce qu’il a fait grève à l’appel du FLN. Il est à nouveau
emprisonné. Cette fois-ci au camp de Lodi, à une centaine de kilomètres au sud
d’Alger. Là où moisissent les « Français de souche » suspectés d’être
favorables aux thèses indépendantistes et où sera aussi enfermé Henri Alleg,
l’auteur de La Question. Le 30 mars 1958, quatre ans avant l’indépendance, des
militaires viennent le chercher, le poussent dans un camion, puis sur un
bateau en direction de Marseille. Sur simple arrêt préfectoral, Fernand
Doukhan vient d’être expulsé d’Algérie. Il n’y retournera plus jamais.
Il est mort en 1996 à Montpellier. Sans laisser de souvenirs, de
correspondances, de journal intime, ni même d’héritiers. Ce livre a été un
long voyage dans le passé, à la recherche des traces qui restaient de lui, en
France, en Algérie, dans les archives, auprès des témoins qui ont croisé sa
route. »


Nathalie Funès
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