- EAN13
- 9782012033948
- ISBN
- 978-2-01-203394-8
- Éditeur
- Black Moon
- Date de publication
- 28/08/2013
- Collection
- BLACK MOON THRI (5)
- Séries
- Annika B.
- Nombre de pages
- 448
- Dimensions
- 22 x 14 x 2,8 cm
- Poids
- 454 g
- Langue
- français
- Langue d'origine
- suédois
Autres livres dans la même série
Les enquêtes
d'Annika Bengtzon
Studio 6
Fondation Paradis
Meurtre en prime time
Deadline
L'édition originale de cet ouvrage a paru en langue suédoise
chez Piratförlaget sous le titre :
Den Röda Vargen
Copyright © 2003 by Liza Marklund.
Published by agreement with Salomonsson Agency.
Traduit du suédois
par Catherine Renaud.
Couverture : © Masterfile.
Conception graphique : Véronique Figuière.
Hachette Livre, 43, quai de Grenelle, 75015 Paris.
© Hachette Livre, 2013, pour la traduction française.
ISBN : 978-2-012-03417-4
Traduit du suédois
par Catherine Renaud
PROLOGUE
À cause de sa consistance épaisse et gluante, il n'avait jamais supporté la vue du sang. Il savait bien que c'était complètement irrationnel, surtout pour quelqu'un comme lui. Ces derniers temps, sans qu'il parvienne à la contrôler, cette répulsion l'avait surpris jusque dans ses rêves.
Il regarda ses mains et découvrit qu'elles étaient couvertes d'un sang humain rouge foncé, encore chaud et poisseux, qui gouttait sur son pantalon. L'odeur l'assaillit. Pris de panique, il recula et essaya de s'en débarrasser en secouant ses mains.
— Hé ho, on est arrivés !
La voix traversa la fine membrane de son sommeil, et, d'un coup, le sang disparut, mais l'intense nausée était toujours présente. Un froid piquant s'engouffrait par la porte ouverte du bus. Le chauffeur avait rentré sa tête entre ses épaules dans une vaine tentative de protection.
— Ou bien tu comptes peut-être m'accompagner jusqu'au garage ?
Tous les autres passagers étaient déjà descendus de la navette de l'aéroport. Il se leva péniblement, la douleur le faisant se voûter légèrement. Il attrapa son sac de marin sur le siège à côté, marmonna un merci beaucoup.
La secousse quand ses pieds touchèrent le sol lui arracha un gémissement. Il s'appuya un instant contre la carrosserie métallique glacée du véhicule, tout en s'essuyant le front.
Une femme, portant un bonnet de laine, qui se dirigeait vers l'arrêt de bus un peu plus loin, s'arrêta devant son sac de marin. Son regard trahissait une inquiétude sincère et, courbant le dos, elle se pencha sur lui.
— Ça ne va pas ? Vous avez besoin d'aide ?
Sa réaction fut violente et immédiate, il agita sa main devant son visage.
— Laissez-moi ! répondit-il bien trop fort, essoufflé par son effort.
La femme ne bougea pas, cligna des yeux plusieurs fois, la bouche entrouverte.
— Êtes-vous sourde ? J'ai dit laissez-moi !
Son agressivité crispa le visage de la femme qui recula en lui jetant un regard offensé. Il la regarda s'éloigner d'un pas lourd avec ses énormes sacs plastiques, vers l'arrêt du bus numéro 3.
Je me demande si ça ressemble à ça quand je parle suédois, pensa-t-il.
Il prit conscience qu'il pensait dans sa langue maternelle.
Indépendance, pensa-t-il, en forçant son cerveau à retourner au français. Je suis mon propre maître.
La femme le fusilla du regard avant de monter dans son bus.
Il resta debout dans les vapeurs de diesel pendant que les bus disparaissaient, laissant la rue Storgatan se vider.
Nulle part ailleurs l'espace n'est aussi proche qu'au cercle polaire arctique. En grandissant, il tenait l'isolement pour acquis, il ne comprenait pas ce qu'il y avait d'incroyable à habiter sur le toit du monde. Maintenant il les percevait, aussi clairement que si elles avaient été gravées dans les rues, les maisons, les pins gelés : la solitude et la vulnérabilité, les distances infinies. Si familières et pourtant étrangères.
C'est un endroit difficile à vivre, pensa-t-il, à nouveau en suédois. Une ville complètement gelée, qui dépend des aides de l'État et de l'acier.
Exactement comme moi.
Il passa précautionneusement la lanière du sac sur ses épaules et sa poitrine, et se dirigea vers l'entrée du Stadshotel. Extérieurement, le bâtiment, qui datait du début du siècle, était conforme à ses souvenirs, mais il ne pouvait juger des changements intérieurs. Durant tout le temps passé à Luleå, il n'avait jamais eu l'occasion d'entrer dans un tel monument de la bourgeoisie.
La réceptionniste accueillit le vieux Français avec une politesse distraite. Elle lui attribua une chambre au deuxième étage, l'informa des horaires du petit déjeuner, lui donna une carte magnétique, et l'oublia aussitôt.
C'est au milieu d'une foule qu'on est le moins visible, pensa-t-il, alors qu'il la remerciait dans un anglais maladroit, tout en se dirigeant vers l'ascenseur.
La chambre était faussement luxueuse malgré son prix et son emplacement. Carrelage glacial, copies de meubles anciens, fenêtres sales et murs recouverts d'une tapisserie en fibre de verre tachée.
Il s'assit un moment sur le lit, regardant le crépuscule. Ou était-ce encore l'aube ?
La vue sur la mer dont la page d'accueil sur Internet faisait étalage se résumait à une eau grise, quelques maisons en bois près d'un port, une enseigne en néon et un grand toit recouvert de goudron noir.
Il était sur le point de s'endormir, se leva, secoua la tête pour rester éveillé, remarqua à nouveau l'odeur qui semblait suinter de son corps. Il alla ouvrir son sac de marin et aligna ses médicaments sur le bureau, en commençant par les antalgiques. Puis il s'allongea sur le lit, attendant que la sensation de nausée s'apaise lentement.
Il était donc enfin arrivé.
La mort est ici.
. En français dans le texte. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
. En français dans le texte. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
. En français dans le texte. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
Mardi 10 novembre
Annika Bengtzon s'arrêta sur le seuil de la rédaction et cligna des yeux dans la lumière crue des néons. Le bruit la percuta, imprimantes qui vrombissaient, scanners qui bourdonnaient, léger cliquetis des ongles coupés courts sur les touches des claviers. Le personnel gavait les appareils de textes, images, lettres, commandes, signaux, remplissait les estomacs digitaux sans aucun espoir de les rassasier.
Elle prit plusieurs inspirations profondes et vogua sur cette mer que composait la rédaction. Près du Service des Infos, régnait une activité silencieuse empreinte de concentration. Le Clou, le rédacteur en chef, étudiait des documents, les pieds croisés sur son bureau. Le rédacteur en chef adjoint de la rubrique Info, les yeux de plus en plus rouges, parcourait son écran scintillant. Reuters et l'AFP, Associated Press, TTA et TTB, nouvelles nationales et internationales, sport et économie, télégrammes du monde entier arrivant en un flux incessant. L'excitation n'était pas encore tangible, l'enthousiasme ou la déception suite aux scoops réussis ou échoués, les débats passionnés n'avaient pas commencé.
Annika passa sans regarder quiconque, sans qu'on la vît.
Puis soudain une voix rompit le silence électrique :
— Tu vas encore repartir en voyage ?
Annika sursauta et fit involontairement un pas de côté. Tourna son regard mal assuré en direction du Clou et fut éblouie par la lampe à basse consommation.
— C'est écrit ici que tu t'envoles pour Luleå cet après-midi.
Elle prit le coin du bureau de l'équipe du matin dans la cuisse en se tournant trop brusquement en direction de sa cage de verre. Elle s'arrêta, ferma les yeux un court instant, sentit son sac glisser de son épaule et se retourna.
— Peut-être, pourquoi ?
Mais le rédacteur en chef était déjà parti, il l'avait abandonnée, seule en pleine mer, coincée entre les regards et les soupirs numériques dont elle perçut l'ironie. Annika s'humecta les lèvres et remonta son sac sur son épaule.
Toutes voiles dehors, elle y était presque. L'aquarium fut vite là. Soulagée, elle tira la porte sur le côté et se réfugia au milieu des rideaux fatigués. Elle referma la porte derrière elle et appuya l'arrière de sa tête contre la vitre froide.
Au moins, ils lui avaient laissé son bureau.
L'immuable jouait un rôle de plus en plus important, c'était quelque chose qu'elle sentait, à la fois pour elle-même et pour la société. Quand le chaos régnait et que la guerre changeait de nature, il était plus important que jamais de regarder en arrière, de tirer profit de l'Histoire.
Elle jeta son sac et son manteau sur le sofa, alluma son ordinateur. Le journalisme d'investigation lui...
d'Annika Bengtzon
Studio 6
Fondation Paradis
Meurtre en prime time
Deadline
L'édition originale de cet ouvrage a paru en langue suédoise
chez Piratförlaget sous le titre :
Den Röda Vargen
Copyright © 2003 by Liza Marklund.
Published by agreement with Salomonsson Agency.
Traduit du suédois
par Catherine Renaud.
Couverture : © Masterfile.
Conception graphique : Véronique Figuière.
Hachette Livre, 43, quai de Grenelle, 75015 Paris.
© Hachette Livre, 2013, pour la traduction française.
ISBN : 978-2-012-03417-4
Traduit du suédois
par Catherine Renaud
PROLOGUE
À cause de sa consistance épaisse et gluante, il n'avait jamais supporté la vue du sang. Il savait bien que c'était complètement irrationnel, surtout pour quelqu'un comme lui. Ces derniers temps, sans qu'il parvienne à la contrôler, cette répulsion l'avait surpris jusque dans ses rêves.
Il regarda ses mains et découvrit qu'elles étaient couvertes d'un sang humain rouge foncé, encore chaud et poisseux, qui gouttait sur son pantalon. L'odeur l'assaillit. Pris de panique, il recula et essaya de s'en débarrasser en secouant ses mains.
— Hé ho, on est arrivés !
La voix traversa la fine membrane de son sommeil, et, d'un coup, le sang disparut, mais l'intense nausée était toujours présente. Un froid piquant s'engouffrait par la porte ouverte du bus. Le chauffeur avait rentré sa tête entre ses épaules dans une vaine tentative de protection.
— Ou bien tu comptes peut-être m'accompagner jusqu'au garage ?
Tous les autres passagers étaient déjà descendus de la navette de l'aéroport. Il se leva péniblement, la douleur le faisant se voûter légèrement. Il attrapa son sac de marin sur le siège à côté, marmonna un merci beaucoup.
La secousse quand ses pieds touchèrent le sol lui arracha un gémissement. Il s'appuya un instant contre la carrosserie métallique glacée du véhicule, tout en s'essuyant le front.
Une femme, portant un bonnet de laine, qui se dirigeait vers l'arrêt de bus un peu plus loin, s'arrêta devant son sac de marin. Son regard trahissait une inquiétude sincère et, courbant le dos, elle se pencha sur lui.
— Ça ne va pas ? Vous avez besoin d'aide ?
Sa réaction fut violente et immédiate, il agita sa main devant son visage.
— Laissez-moi ! répondit-il bien trop fort, essoufflé par son effort.
La femme ne bougea pas, cligna des yeux plusieurs fois, la bouche entrouverte.
— Êtes-vous sourde ? J'ai dit laissez-moi !
Son agressivité crispa le visage de la femme qui recula en lui jetant un regard offensé. Il la regarda s'éloigner d'un pas lourd avec ses énormes sacs plastiques, vers l'arrêt du bus numéro 3.
Je me demande si ça ressemble à ça quand je parle suédois, pensa-t-il.
Il prit conscience qu'il pensait dans sa langue maternelle.
Indépendance, pensa-t-il, en forçant son cerveau à retourner au français. Je suis mon propre maître.
La femme le fusilla du regard avant de monter dans son bus.
Il resta debout dans les vapeurs de diesel pendant que les bus disparaissaient, laissant la rue Storgatan se vider.
Nulle part ailleurs l'espace n'est aussi proche qu'au cercle polaire arctique. En grandissant, il tenait l'isolement pour acquis, il ne comprenait pas ce qu'il y avait d'incroyable à habiter sur le toit du monde. Maintenant il les percevait, aussi clairement que si elles avaient été gravées dans les rues, les maisons, les pins gelés : la solitude et la vulnérabilité, les distances infinies. Si familières et pourtant étrangères.
C'est un endroit difficile à vivre, pensa-t-il, à nouveau en suédois. Une ville complètement gelée, qui dépend des aides de l'État et de l'acier.
Exactement comme moi.
Il passa précautionneusement la lanière du sac sur ses épaules et sa poitrine, et se dirigea vers l'entrée du Stadshotel. Extérieurement, le bâtiment, qui datait du début du siècle, était conforme à ses souvenirs, mais il ne pouvait juger des changements intérieurs. Durant tout le temps passé à Luleå, il n'avait jamais eu l'occasion d'entrer dans un tel monument de la bourgeoisie.
La réceptionniste accueillit le vieux Français avec une politesse distraite. Elle lui attribua une chambre au deuxième étage, l'informa des horaires du petit déjeuner, lui donna une carte magnétique, et l'oublia aussitôt.
C'est au milieu d'une foule qu'on est le moins visible, pensa-t-il, alors qu'il la remerciait dans un anglais maladroit, tout en se dirigeant vers l'ascenseur.
La chambre était faussement luxueuse malgré son prix et son emplacement. Carrelage glacial, copies de meubles anciens, fenêtres sales et murs recouverts d'une tapisserie en fibre de verre tachée.
Il s'assit un moment sur le lit, regardant le crépuscule. Ou était-ce encore l'aube ?
La vue sur la mer dont la page d'accueil sur Internet faisait étalage se résumait à une eau grise, quelques maisons en bois près d'un port, une enseigne en néon et un grand toit recouvert de goudron noir.
Il était sur le point de s'endormir, se leva, secoua la tête pour rester éveillé, remarqua à nouveau l'odeur qui semblait suinter de son corps. Il alla ouvrir son sac de marin et aligna ses médicaments sur le bureau, en commençant par les antalgiques. Puis il s'allongea sur le lit, attendant que la sensation de nausée s'apaise lentement.
Il était donc enfin arrivé.
La mort est ici.
. En français dans le texte. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
. En français dans le texte. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
. En français dans le texte. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
Mardi 10 novembre
Annika Bengtzon s'arrêta sur le seuil de la rédaction et cligna des yeux dans la lumière crue des néons. Le bruit la percuta, imprimantes qui vrombissaient, scanners qui bourdonnaient, léger cliquetis des ongles coupés courts sur les touches des claviers. Le personnel gavait les appareils de textes, images, lettres, commandes, signaux, remplissait les estomacs digitaux sans aucun espoir de les rassasier.
Elle prit plusieurs inspirations profondes et vogua sur cette mer que composait la rédaction. Près du Service des Infos, régnait une activité silencieuse empreinte de concentration. Le Clou, le rédacteur en chef, étudiait des documents, les pieds croisés sur son bureau. Le rédacteur en chef adjoint de la rubrique Info, les yeux de plus en plus rouges, parcourait son écran scintillant. Reuters et l'AFP, Associated Press, TTA et TTB, nouvelles nationales et internationales, sport et économie, télégrammes du monde entier arrivant en un flux incessant. L'excitation n'était pas encore tangible, l'enthousiasme ou la déception suite aux scoops réussis ou échoués, les débats passionnés n'avaient pas commencé.
Annika passa sans regarder quiconque, sans qu'on la vît.
Puis soudain une voix rompit le silence électrique :
— Tu vas encore repartir en voyage ?
Annika sursauta et fit involontairement un pas de côté. Tourna son regard mal assuré en direction du Clou et fut éblouie par la lampe à basse consommation.
— C'est écrit ici que tu t'envoles pour Luleå cet après-midi.
Elle prit le coin du bureau de l'équipe du matin dans la cuisse en se tournant trop brusquement en direction de sa cage de verre. Elle s'arrêta, ferma les yeux un court instant, sentit son sac glisser de son épaule et se retourna.
— Peut-être, pourquoi ?
Mais le rédacteur en chef était déjà parti, il l'avait abandonnée, seule en pleine mer, coincée entre les regards et les soupirs numériques dont elle perçut l'ironie. Annika s'humecta les lèvres et remonta son sac sur son épaule.
Toutes voiles dehors, elle y était presque. L'aquarium fut vite là. Soulagée, elle tira la porte sur le côté et se réfugia au milieu des rideaux fatigués. Elle referma la porte derrière elle et appuya l'arrière de sa tête contre la vitre froide.
Au moins, ils lui avaient laissé son bureau.
L'immuable jouait un rôle de plus en plus important, c'était quelque chose qu'elle sentait, à la fois pour elle-même et pour la société. Quand le chaos régnait et que la guerre changeait de nature, il était plus important que jamais de regarder en arrière, de tirer profit de l'Histoire.
Elle jeta son sac et son manteau sur le sofa, alluma son ordinateur. Le journalisme d'investigation lui...
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