L'intériorité réciproque

Ce livre n’est pas un livre sur Michel Henry ni sur Maine de Biran. Il est un livre sur le rapport que le premier a cru devoir établir avec le second – ce qu’Anne Devarieux nomme une relation d’intériorité réciproque – et a effectivement établi, mû par une nécessité proprement philosophique. Ce travail est factuellement né d’un agacement répété : les lecteurs de M. Henry ne sont pas toujours de fait lecteurs de Maine de Biran. L’inverse est moins vrai, tant on ne peut faire l’économie de la lecture henryenne, ô combien controversée pour ne pas dire rejetée par les gardiens du temple de l’orthodoxie biranienne. Ce travail voudrait ainsi remplir un vide, en montrant ce qui se joue dans la « lecture » que l’un fait de l’autre, car le biranisme de Henry ne se limite pas, loin s’en faut, à la géniale interprétation qu’il donne de la pensée de Biran dans son premier opus. Loin cependant de constituer seulement une étude d’histoire de la philosophie contemporaine, il s’agit de retrouver le double engendrement de chacune de ces philosophies par la lecture de l’autre. M. Henry lit Biran en phénoménologue, son horizon est celui de la phénoménologie, mais c’est pourtant en Biran, et en nul autre, qu’il croit trouver la solution au problème laissé vacant par ce qu’il nomme, avec beaucoup d’ambiguïtés il est vrai, la « phénoménologie historique ».